Navigation et cartographie

Anne s’entraine à prendre la méridienne à Porquerolles en 1978

Nous n’utilisons plus de sextant mais nous avons bien sûr encore quelques cartes papier à bord (essentiellement des routiers océaniques que nous utilisons pour préparer nos itinéraire) mais 100 % de la navigation proprement dite se conjugue électroniquement

Nous préférons utiliser un ordinateur plutôt qu’un traceur. Les possibilités d’utilisation d’un ordi sont plus étendues, à taille d’écran identique (13″) son coût est beaucoup moins élevé, on peut se permettre d’en avoir 2. Il y a un choix assez large de logiciels de navigation, les mises à jour sont beaucoup plus simples et on peut importer facilement des données telles que routes ou waypoints d’un logiciel à un autre.

Notre ordi de navigation est un Thinkpad Lenovo logé bien au sec sur un berceau à l’intérieur de la table à carte. Son écran est visible à travers une vitre incassable aménagée dans la table. Clavier et souris étanche sur la table et recopie de l’écran sur iPad en boitier étanche utilisable à la barre ou sous la véranda. (fixation et prise USB aux 2 endroits)

Pour nous les points les critères les plus importants dans le choix d’un logiciel de navigation sont :

  1. disponibilité d’une cartographie à jour et fiable couvrant le monde entier
  2. stabilité (pas de plantage ni de bugs) il n’y pas pire qu’un écran qui se fige au moment critique
  3. Interface claire et facile d’utilisation
  4. connexion rapide et simple des appareils (GPS, AIS, compas, speedo, sondeur et capteur vent )
  5. possibilité de routage et de suivi des performances

Nous utilisons MaxSea Time Zero depuis plusieurs années (en ce moment la version 4.1) La société Maxsea a été très critiqué pour sa politique commerciale et tarifaire sur certain forums français mais nous en sommes pour notre part très satisfait et chaque fois que nous avons eu besoin nous avons trouvé leur équipe très réactive tant sur le plan technique que commercial. Pour nous Le programme est stable et fiable. L’interface est simple et conviviale tout en offrant beaucoup d’outils utiles tout en restant adaptable à toutes les situations. Le module routage notamment est très pratique pour optimiser des dates de départ ou des itinéraires avec de nombreux way-points (pour les grandes traversées je préfère cependant QTVlm). La connexion aux instruments est très simple, on récupère les données NMEA2000 de la centrale de navigation B&G H5000 grâce à une interface USB Actisense NG1 (plug and play) ce qui permet de récupérer les données de tous les instruments du réseau (compas, sondeur, capteurs vent etc) et de les afficher sur l’écran de navigation. On peut ainsi afficher en direct sur la carte des paramètres utiles et intéressants comme les lay lines (les limites des bords théoriques les plus favorables pour atteindre une marque de parcours au vent ou sous le vent) ou le pourcentage de la polaire (comparaison avec la vitesse actuelle du bateau sur la surface et de la vitesse théorique en fonction de l’angle et de la force du vent).

L’affichage et le suivi des cibles AIS directement sur la carte est aussi un gage de sécurité très important par rapport à un système indépendant, non seulement pour visualiser la route des navires aux alentours mais aussi parce que de plus en plus de balises cardinales et latérales sont équipées d’émetteurs AIS: c’est toujours rassurant de voir leur signal AIS se superposer gentiment avec l’icône de la marque sur la carte .

Interface simple et complète

Mais si toutes ces possibilités sont intéressantes et utiles, le choix fondamental réside dans la disponibilité et la fiabilité de la cartographie. Quand on navigue en Europe, avoir la dernière mise à jour des cartes électroniques n’est pas très important, les côtes ont été cartographiées très précisément depuis des dizaines d’années et n’ont pas changé depuis, de même que le balisage. Dans d’autres régions du monde ce n’est pas du tout le cas et les services hydrographiques de ces pays continuent à effectuer des relevés pour couvrir les zones blanches des cartes d’hier, à mettre en place de nouvelles balises etc comme nous avons pu nous en rendre compte en Patagonie ou les cartes les plus récentes sont parfaitement exactes alors que celles datant de quelques années nous plaçaient parfois sur terre. Dans certain cas se sont les côtes elles même qui changent (irruption volcanique, tremblement de terre, construction de nouveaux ports, ponts, îles artificielles etc). Par exemple, aux Tonga, une nouvelle île est apparue du fond de l’océan en 2015 lors de l’irruption d’un volcan sous-marin près de Hunga Tonga ou encore la baie de Lyttelton (port de l’île du sud de la Nouvelle Zélande) dont le fond est remonté de presque 1 mètre lors du tremblement de terre meurtrier de 2011. Je vous laisse imaginer les surprises d’un navigateur utilisant des cartes datant de seulement 10 ans dans ces coins là…

2015, une nouvelle île apparait aux Tonga (crédit photo: Tongan Navy)

Nous avons utilisé Open CPN (gratuit) avec la dernière version cartes officielles Brésiliennes lors du notre passage dans ce pays. Nous y jetons un coup d’oeil de temps en temps lors de nos navigations côtières en Nouvelle Zélande parce que les cartes raster officiel montrent parfois certains détails qui n’apparaissent pas bien sur les cartes C.Map ou Navionics de Time Zero. Rien à redire sur ce logiciel, il fonctionne très bien même si l’interface GPS et instruments accepte peu de modèles et n’est pas toujours des plus simples à configurer. Mais à par le Brésil et la Nouvelle Zélande, seuls les Etats-Unis fournissent une cartographie complète à jour et téléchargeable gratuitement au format BSD. Pour le reste du monde il faut donc soit les acheter chez les éditeurs compatibles soit les créer soi-même ou se contenter de copies de cartes gratuites tombées du ponton et circulant ici et là. Ces dernières sont très bien pour préparer un voyage mais elles datent souvent de plusieurs années (voire dizaines d’années) et leur utilisation en navigation présente donc certains risques que nous ne sommes pas prêts à prendre (voir plus haut).

D’où notre choix : tant qu’à investir pas mal d’argent dans la dernière cartographie autant avoir aussi un logiciel performant qui s’il n’est pas gratuit, reste plus abordable qu’ADRENA ou Expédition. Nous avons aussi essayer iNavx sur iPad mais malgré plusieurs mise à jour (iOS et iNavX) le logiciel plantait régulièrement et les possibilités sur une tablette restent plus limitées que celle des bons programmes pour ordinateur.

Comme il ne faut rien laisser au hasard et que dans certaines régions il est toujours bon de vérifier ce que disent les cartes et à quoi ressemble vraiment la côte nous utilisons des images satellites sur Ozie Explorer (merci à Damien pour nous avoir fait découvrir ce programme et pour toutes tes images que tu avais préparées). Pour télécharger et géoréférencer des images satellites nous utilisons SAS Planet.

Mais est-ce vraiment raisonnable de dépendre autant de l’électronique? Avec 2 ordis pouvant se connecter à 4 source GPS distinctes, le multifonction ( 8’ avec une carto sommaire et son GPS intégré), les 2 iPads et le téléphone disposant de leur propre GPS et d’une carto océanique de base, le tout alimenté par une redondance de sources électriques, nous pensons être raisonnablement à l’abri d’une panne totale de tous les systèmes de navigation… et si c’était le cas, il faudrait se débrouiller à l’estime avec les cartes papiers à grande échelle.