Le Mercredi 10 avril 2024 à 02:00 nous mouillons dans la rade de Syracuse après 3 jours et 18 heures de traversée. Nous avons suivi assez précisément les routages que nous avions fait avant de quitter la Crète (nous n’avons plus d’abonnement Iridium donc plus d’internet quand nous sommes en dehors de portée des antennes 4G soit environ 10 à 20 milles des côtes) Les prévisions des gribs se sont révélées étonnamment proches de la réalité jusqu’à l’arrivée en dépit du fait qu’elles dataient de 4 jours (Arpège, GFS et ICON – les 3 donnaient sensiblement les mêmes conditions). Du petit temps au départ, quarante heures de vent bien soutenus mais jamais plus de 18 nœuds, 1 vingtaine d’heures de moteur pour aider le passage dans la mer avec moins de 7 nds de vent et d’excellentes conditions de mer et de vent pour les dernières 24 heures. Énormément de trafic maritime dans les deux sens, j’ai dû appeler au moins 8 cargos pour savoir de quel côté ils voulaient nous croiser suscitant toujours une réaction très aimable de l’officier de quart suivi d’un changement de route leur permettant de passer à bonne distance. Aussi beaucoup d’activités de contrôle de la part de la marine et des gardes côtes italiens avec navires et avions, sans doute la chasse aux passeurs de migrants?
La rade de Syracuse est parfaite pour une arrivée de nuit : bon alignement d’entrée, à l’abri de tous les vents, beaucoup de place pour ancrer sur un fond plats à 8m. La citadelle et la vieille ville illuminées nous accueillent. Ne pas oublier toutefois d’appeler le « Harbour Master » pour confirmer la zone de mouillage.
Après une bonne nuit de sommeil nous allons à terre pour jouer les touristes (en fait c’est pas un jeux, c’est pour de vrai.:))
L’histoire de la Sicile en général et de Syracuse en particulier est extrêmement compliquée : fondée par les Grecs, revendiquée par Carthage, conquise par les romains puis les Byzantins, 2 siècles et demi sous domination Arabe puis Normande, Souabe, Angevine, Aragonaise, Espagnole, Bourbon de Naples et j’en passe, avant de devenir finalement Italienne en 1860. Toutes ces péripéties ont laissé beaucoup de traces dans la vieille ville bâtit sur l’île d’Orthigie et se retrouvent dans l’architecture très variée des monuments.
On commence notre visite par les remparts surplombant la rade. La fontaine d’Arethuse est une source d’eau douce limpide coulant dans un bassin pratiquement au niveau de la mer dont elle est protégée par un mur. Elle alimentait autrefois la ville en eau potable. La légende veut que la nymphe Aréthuse aurait été changée en source par Diane pour lui permettre d’échapper aux assiduités du dieu fleuve Alphée.
Une impressionnante forteresse commande l’entrée de la rade c’est le château Maniace (du nom du général Byzantin qui en construit la première version aux alentours de l’an mille. La citadelle actuelle aurait été édifiée 2 siècles plus tard à l’initiative de l’empereur Frederik II duc de Souabe. Malheureusement le château est fermé au public jusqu’à la semaine prochaine en raison d’un festival de cinéma.
Nous nous contenterons de l’admirer de l’extérieur depuis le pied de la très récente statue d’Icare.
Autre monument intéressant : la cathédrale, érigée au 7éme siècle en incorporant les colonnes d’un temple grec dédié à Athéna, elle fut à l’époque la première cathédrale construite en Europe et la deuxième dans le monde après celle d’Antioche. Sa façade extérieure de style baroque ainsi qu’une grande partie de la déco intérieure date de la fin du 17ème siècle.
Nous passons une bonne partie de la journée a déambuler dans les ruelles.
Pour l’anecdote : toutes les boutiques de la ville vendent des têtes de maures en porcelaine colorées toujours par deux (l’homme et la femme). Les légendes qui ont créé cette popularité datent de la domination Arabe (1000/1200) et seraient basées sur une histoire d’amour clandestine qui aurait mal tournée…
En faisant le ménage à bord le jour suivant on s’aperçoit qu’il y à de l’eau douce dans les fonds. Une fuite sur le réservoir du carré (nous avons 2 réservoirs d’eau douce, l’autre est sous la couchette avant). La fuite est rapidement identifiée et peut être assez facilement réparée. Mais ce réservoir est moitié plein il faut donc transvaser son contenu dans le réservoir avant qui lui est presque vide et bien sûr il nous manque un peu de matériel pour le faire. Nous parcourons donc les rues de la ville moderne à la recherche d’un quincaillier ou d’un magasin de bricolage avec un rayon plomberie mais aucun n’a ce qu’il nous faut (les 4 endroits visités n’ont d’ailleurs pratiquement rien à part des robinets domestiques) on va donc se débrouiller avec les moyens du bord et finalement çà se passera très bien. La ville moderne ne présente strictement aucun intérêt : beaucoup de détritus sur les trottoirs et de maisons délabrées l’endroit ne respire pas la richesse. Il y a quelques sites disséminés dans cette partie de la ville mais après notre tournée des quincailliers on ne se sent pas le courage de se faire la visite d’un musée de toute façon on aurait voulu on aurait pas pu : le musée et le parc d’archéologie sont fermés pour la préparation de concerts.
Le lendemain nous sommes contrôlés par la vedette de la Guardia di Finanzia (Douane) ils ne nous abordent pas mais nous tendent une épuisette dans la quelle nous plaçons nos documents qu’ils vont contrôler un peu plus loin avant de revenir nous les rendre toujours avec l’épuisette. Ils sont très polis et l’un deux parle parfaitement français.
A quai il y a un navire de l’ONG Sea Watch spécialisé dans le secours en mer au migrants. Nous le voyons sortir du port mais visiblement il met cap au nord, à l’opposé donc de sa zone d’activité supposée au large de la Libye. Fin de mission ou restriction imposée par les autorités ?…
Dimanche matin on décide d’aller faire les courses au Lidl du coin (partie nord ouest de la rade). Cette zone de la baie est un mélange de friches industrielles couvertes d’ordures, d’usines délabrées squattées par des migrants, route étroite avec beaucoup de circulation sans trottoir utilisable pour les piétons et parmi tout ça, centres commerciaux bar de motards et restaurant chics.
De retour à bord avec nos provisions, nous finissons la réparation du réservoir et le rangement de toutes les affaires que nous avions dû déplacer pour l’atteindre il est 16:30.
De puis que nous sommes à Syracuse, nous continuons bien sûr à suivre de près l’évolution de la météo et nous avons identifié que les prochaines 24 heures présentent les conditions idéales pour passer sereinement le détroit de Messine : très peu de vent mer plate, courant minimum (mortes eaux coefficient 40) conditions qui ne semblent pas vouloir se reproduire avant très longtemps. Mais pour atteindre à temps il faut partir tout de suite sans faire escale en route. Banco le temps d’une courte baignade et nous levons l’ancre !