Arrivederci la Campanie, Ciao la Sardaigne

Jeudi 25 Avril, une fenêtre météo se profile qui devrait nous permettre de traverser enfin sans souci cette mer Thyrrénienne vers le nord de la Sardaigne.

Mais le temps de comparer les modèles, discuter des destinations possibles et faire tourner les routages il est déjà 11:00. Et en jetant un coup d’œil dehors on trouve qu’il y beaucoup de monde à la marina aujourd’hui. Et m…. ! on avait oublié, aujourd’hui c’est l’anniversaire de la chute du fascisme et de la fin de la guerre et c’est donc un jour férié en Italie. On se précipite donc en ville avant que les magasins ne ferment (la plupart restent ouvert jusqu’à 13:00. Il nous faut donc faire les provisions, le Carrefour Express tout proche et le 365 près de la gare y pourvoiront. Mais surtout il nous faut trouver à tout prix un broyeur pour qu’Anne puisse continuer à faire notre lait d’amande et surtout ses fameux cookies à l’okara dont la recette est pour l’instant tenue strictement secrète mais que je ne désespère pas de voire paraître un jour dans la rubrique cuisine de ce blog -stay tuned ! Sans ces délicieux biscuits la vie serait bien terne. Bon, il à fallu faire vite, mais on a tout trouvé, ouf !

Le lendemain matin sous un ciel très maussade nous larguons les amarres. Il n’y a plus de vent mais la mer est encore agitée. Contrairement aux grands océans ou une houle de 3 ou 4 m peut passer quasiment inaperçue, ici, 1 m c’est déjà très gênant tant la période (le temps entre 2 crêtes) est courte (ici 4 ou 5 secondes). Nous longeons la côte Almafitaine rendue célèbre par sa beauté et par les nombreux films tournés à Amalfi ou dans les environs. Mais aujourd’hui, elle a perdu tout son charme tant le temps est bouché. Le temps s’éclaircit quand nous passons à côté de Capri que nous avions adoré lors de notre visite il y a quelques années. En regardant à l’Est on distingue le Vésuve qui ne semble pas en irruption aujourd’hui. Au milieu de la baie de Naples nous croisons un voilier magnifique : le fameux Class J Topaz : 43m, 180 tonnes, 950m2 de voilure au près. Ce serait la réplique, lancée en 2014, d’un concurrent de la Coupe de l’América 1935.

La houle résiduelle d’Ouest et le vent qui va tourner du Sud-Ouest à L’Est au cours de la nuit, ne nous laisse pas beaucoup de choix pour le mouillage. Nous optons pour la côte ouest de Procida, aujourd’hui bien protégée, mais nettement moins jolie que la côte Est ou se trouve notamment le fameux village éponyme avec ces maisons aux murs de toutes les couleurs. Au matin l’eau de la baie est trouble et dégage une odeur pestilentielle : les égouts de la ville se déverseraient-ils ici ?

Le créneau mer plate vent adéquat se confirme pour Dimanche. Nous avons le temps pour un halte à Ponza. Il reste encore un peu de houle mais le vent est suffisant pour stabiliser le Rêve à Deux, propulsé par son grand spi. Nous passons au large de la petite île de Ventotene. Sur l’horizon, Poza apparaît comme un croissant de falaise. Cette fois encore, la côte Est ou se situe le port et la ville principale est ouverte à la houle nous allons donc sur l’ Ouest. Mais là, pas de déception, au contraire, le paysage de hautes falaises est tout simplement grandiose. Nous mouillons dans la Cala Feola, juste entre le bout de la jetée et les piscines naturelles creusées dans la roche au pied de la falaise. Mais avant d’aller voir ces bassins il nous faut nous baigner ici au bateau : l’eau est tellement claire qu’on ne peut y résister. Nous avons vu notre lot d’eaux transparentes et cristallines aux quatre coins du monde mais là, c’est le top du top, on a tout simplement l’impression d’être suspendu dans le vide au dessus d’un sable turquoise c’est magique. En plus elle avoisine les 20° donc on peut nager un peu. Les grottes et les arches qui mènent aux piscines sont superbes mais malheureusement le fond du bassin naturel est souillé de déchets d’emballages…

Le lendemain, départ matinal encore sous spi mais cette fois-ci sur une mer sans houle ni vagues. On passe à proximité de l’île Palmarola et de ses falaises vertigineuses. En début d’après-midi, juste à l’heure prévue par le routage, le vent se calme et le spi ne porte plus, on met donc le moteur pour aller chercher le vent de Nord qui doit s’établir une vingtaine de milles plus loin.

On traverse d’immense bancs de Vellele. Ce ne sont pas des méduses mais des hydrozoaires, constitués chacun d’une colonie de polypes, portés par un disque cartilagineux, surmonté d’une voile rigide. Il parait qu’on en trouve un peu partout dans le monde et particulièrement en Méditerranée en cette saison mais nous n’en encore jamais rencontré. Pour en savoir plus cliquez le liens ci-dessous:

https://doris.ffessm.fr/Especes/Velella-velella-Velelle-228

Nuit paisible dans une dizaine de nœuds de vent de travers. Grande première depuis Mayotte, nous captons notre premier message en français sur la VHF : c’est une alerte météo émanant du CROSS Med Ajaccio histoire de nous rappeler qu’on est plus très loin des côtes françaises.

Au matin on voit les côtes Sardes se détacher sur l’horizon.

Plus nous approchons plus leur beauté se révèle à nos yeux. C’est un savant mélange de hautes falaises, d’îlot rocheux usés par la mer, de collines couvertes de maquis et de plages de sable blanc aux eau turquoise ou peut-être plutôt émeraude, en effet , cette portion de côte entre Olbia, où nous atterrissons, et les Bouches de Bonifacio s’apelle la Costa Smeralda… çà donne envie d’y passer quelque temps.

A 14:00, nous embouquons le chenal du port d’Olbia, petit arrêt à la station service de la marina pour remplir quelques jerrycans de gasoil (la dernière fois c’était à Leros et les stations semblent rares sur cette côte). Au passage un grand merci au pompiste l’accostage vent de travers dans les rafales qui s’étaient subitement mises à souffler était un peu olé-olé. On repart aussitôt pour aller mouiller au calme devant la plage de la Saline juste à la sortie de la baie. On va pouvoir réfléchir au programme des jours suivant qui risque d’être un peu compliqué en raison d’un bon coup de Mistral prévu pour le milieu de la semaine: affaire à suivre…

Paestum

On n’avait pas encore vu beaucoup de vieilles pierres cette année mais là on s’est bien rattrapé.

Non nous sommes pas retourné à Pompeï que nous avons visité 3 ou 4 fois par le passé mais à Paestum un site beaucoup moins connu mais tout aussi intéressant. Situé en Campanie, une quarantaine de km au Sud de Salerne entre Battipaglia et Agropoli. Très facile d’accès en 30’ de train (ticket : 3,40 euros) depuis la gare de Salerne, avec des départs pratiquement toutes les heures.

Un chemin piétonnier mène directement, à travers les murs de la cité, à l’entrée du site proprement dite.

C’est un site immense et très agréable à visiter avec ses 3 temples Grecs, sans doute parmi les mieux conservés au monde, et ces nombreux vestiges très instructifs. Mais avant de le découvrir en image, penchons nous un peu sur son histoire:

C’est aux environs de 600 avant notre ère que des Grecs venus de Sybaris (une colonie Grecque située en Calabre sur le golfe de Tarente) fondèrent la cité sous le nom Poseidonia. Elle était à l’époque sur le bord de la mer à l’embouchure d’un fleuve. C’est son port et son sanctuaire qui en firent la richesse et la célébrité atteignant son apogée au cours des VIe et Ve siècles av. J.-C. Son sanctuaire devint l’un des plus vastes et des plus vénérés de la péninsule italienne.

Vers 420 av. J.-C., les lucaniens, un peuple déjà établit dans la région, évincèrent les Grecs et baptisèrent la ville Paiston.

En 273 avant notre ère, elle devint une colonie romaine, sous le nom de Paestum.

La cité commença à décliner au IVe siècle de notre ère, et la situation s’aggrava avec la chute de l’empire romain. La ville sur sa plaine côtière était très difficile à défendre des attaques barbares. Puis en raison des caprices du fleuve, la région se transforma en un vaste marécage insalubre générant une épidémie de paludisme vers l’an 500. Les survivants préférèrent quitter la ville pour s’établir au pied de la montagne notamment à Capaccio. Le site de Paestum, fut oublié de tous à part quelques bergers qui faisaient paître leur troupeau entre les vestiges sacrés. Il resta abandonné, jusqu’à sa redécouverte au XVIIIe

Voilà vous savez presque tout! Ou vous laisse parcourir les images:

(diaporama)

(diaporama)

(diaporama)

Les rues pavées et les riches villas, certaines avec piscine, datent de l’époque romaine

(diaporama)

Non seulement les monuments sont superbes mais le cadre verdoyant rend la visite très agréable. De gros nuages noirs venant de la mer s’amoncellent dans le ciel et nous songeons plusieurs fois à chercher un abri mais ils passent tous à droite ou à gauche du site sans qu’une goutte nous atteigne.

(diaporama)

En plus de son sanctuaire, la ville disposait de tout ce qui fait une grande cité, amphithéâtre, ekklesiasterion et comitium (utilisés par les notables de la ville pour leur débats ), forum entouré de galeries marchandes et autres centres commerciaux et même un grand asklepeion (hôpital)

Le site actuel n’occupe que la partie centrale de la cité là où se trouvait les principaux monuments. Les murs d’enceinte délimitent une zone près de 3 fois plus grande incluant notamment les quartiers résidentiels et les ateliers des artisans qui restent à ce jour encore enfouis sous la végétation.

(diaporama)

Le site est complété par un musée très intéressant retraçant son histoire depuis le paléolithique jusqu’à nos jours. Une des pièces les plus fameuses de cette collection est sans aucun doute la Fresque du Plongeur découverte dans une tombe de l’époque hellénistique qui a bien sûr un côté très actuel: oui, il y a 25 siècles les jeunes plongeaient en frimant comme aujourd’hui mais l’histoire ne dit pas si le locataire de la sépulture était mort à un âge avancé après une vie sportive bien remplie ou beaucoup plutôt en sautant directement de son balcon dans la piscine un soir de beuverie. Mais surtout cette œuvre très particulière a apporté des renseignements précieux sur les techniques employées par les artisans de l’époque.

Mais l’orage approche et la pluie qui nous a épargnée toute la journée semble maintenant inévitable il est temps de sauter sur nos trottinettes pour rejoindre la gare.

Salerne

Il nous faut trouver une marina pour passer la fin de la semaine à l’abri du mauvais temps prévu. Nous tentons de réserver à Cetara, joli village entre Salerne et Amalfi avec une bonne marina mais ils n’ont plus de place. Nous jetons donc notre dévolu sur la Marina Azimut à Salerne. Nous y arrivons le 23/04/2024 en fin de matinée.

C’est une marina associative gérée par les propriétaires plaisanciers et il y a très peu de place (je pense que Rêve à Deux était de la taille maxi acceptable) mais blottie derrière le mur du port, l’abri est excellent et on est à 2 pas centre ville. Côté service bonne aide à l’amarrage par le gardien très sympa mais sanitaires exigus et peu pratiques dans un container de chantier. Pour le prix (équivalent d’une nuit d’hôtel, 84euros) il pourrait mieux faire ! Mais bon, on va pouvoir laisser Rêve à deux en toute sécurité et faire un peu de tourisme terrestre…

Mais avant d’explorer la ville on voudrait faire une lessive, la dernière remonte à Chania, le linge sale commence à s’entasser ! La laverie automatique la plus proche est à 2,5 km. Qu’à cela ne tienne on sort nos trottinettes à propulsion 100 % pedibus cum jambis et c’est en fait une très agréable promenade sur le Lungomare di Salerno : le front de mer aménagé et boisé qui borde tout le centre ville. 1 h plus tard, tout le linge est étendu sur les cordes à l’arrière du bateau et nous reprenons les trottinettes pour explorer la vieille ville.

Le monument le plus fameux est le Duomo, la cathédrale de Salerne. Construite au 11éme siècle sur un plan inspiré de l’abbaye de Montecassino. Le cloître d’influence arabo byzantine et la tour dateraient du 12ème siècle. La basilique contient de nombreux sarcophages d’époques romaines et plus récents. Elle fut rénovée à la fin 17ème siècle après le tremblement de terre de 1688 dans son style baroque Napolitain actuel.

La riche décoration des murs et des plafonds de la crypte est typique de cette époque mais ici poussé à l’extrême. Le reliquaire situé sous l’autel de cette crypte contiendrait la dépouille de l’évangéliste St Mathieu. Mort en Ethiopie, son corps aurait été rapatrié ici dans des conditions obscures au 5ème siècle directement depuis là bas ou plus probablement de sa sépulture du Caire, et selon certaines légendes, via la Bretagne petite ou grande, en entier ou seulement une main et quelques ossements, d’autres parties ayant été conservées ailleurs en Europe, ici un bras là un crâne…

La vieille ville de Salerne est une ville avec de vrais habitants vivant normalement, pas un musée à ciel ouvert avec pour seuls occupants les touristes des RB&B et les boutiques de souvenirs qui vont avec comme le sont devenu tant de centre-villes historiques.

L’esthétique architecturale s’en ressent un peu avec quelques constructions en béton des année 60 et autres édifices délabrés parmi les demeures d’époques  datant du moyen âge et les immeubles baroques, mais pas l’atmosphère : on sent l’Italie qui vit ! Surtout avec tous ces tags sur les murs! Ce n’est pas du Banksi mais bien une expression populaire à l’état pur. Un clin d’œil à notre amie Dodo qui aime tant cette forme d’art.

Nous arpentons les ruelles jusqu’au soir mais sans toutefois nous attarder car demain nous avons prévus une longue journée: nous prenons le train pour aller visiter les ruines de Peastum…

En remontant la botte

21 avril 2024, après une nuit assez rock’n’roll (surtout roll d’ailleurs) devant le port de Scario nous repartons sans descendre à terre. Le vent c’est calmé mais la houle du large est encore très active.

Le problème de cette partie de la côte italienne est le manque d’abri naturel où il serait possible d’ancrer. Il y a bien quelques petits ports mais ils sont, soit hors de prix, soit mal protégés de la houle, de plus s’il y 3 pontons dans le port chacun est géré par un opérateur différent à des prix pouvant aller du simple au double avec des services la plupart du temps inexistants.

Ça ne donne pas envie de trop s’attarder pourtant la côte avec ces sommets encore enneigés en arrière plan est assez spectaculaire. On profite donc du vent faible pour continuer à gagner vers le Nord.

Au bout de 12 milles nous arrivons au meilleur mouillage de la région. C’est la baia del buon dormire : avec un nom pareil si on ne trouve pas le sommeil… L’endroit est assez grandiose, une jolie crique entourée par les hautes falaises sur le côté sud de la péninsule du cap Palinuro et protégée au Sud Ouest par un îlot rocheux. Effectivement la houle d’ouest qui atteint encore les 2m au large ne se fait pratiquement plus sentir une fois ancrés et nous passons une très bonne nuit.

Étape suivante, Agropoli. Il est possible d’ancrer juste à l’entrée du port, à l’abri de la jetée sous la falaise de la vieille ville. L’endroit est minuscule, avec 15 m de chaîne par 3 m de fond on a l’impression de prendre toute la place et pourtant le guide parle de 8 à 10 bateaux ancrés là en saison : çà doit tricoter dur avec les chaînes !

La vieille ville est assez intéressante mais il y a encore peu de bâtiments convenablement restaurés, on est loin du soucis de perfection des vieilles cités moyenâgeuses de Croatie.

Agropoli serait une déformation du nom qui lui fut donné par les Bizantins, Akropoli, rien à voir donc avec l’agriculture intensive. Le château fort construit par un noble Aragonais au 15ème siècle est en travaux et nous n’avons pu le visiter.

La partie moderne de la ville ne présente pas grand intérêt, on notera tout de même un supermarché Eté (c’est son nom, il est ouvert toute l’année) très bien achalandé à quelques minutes du port et une boutique libre service vendant légalement du hashish et des produits dérivés.

Mais du mauvais temps d’Ouest avec du vent fort et de la houle qui devrait balayer tous les cadrants du Nord Ouest au Sud Ouest est annoncé pour la deuxième partie de la semaine. Il n’y a guère d’autres solutions que de trouver une marina bien abritée : une fois ne sera pas coutume !

Volcan actif et traversée expresse

Samedi 20 avril 2024, six heures du matin le vent qui soufflait très fort hier soir c’est un peu calmé en cessant de mettre du Nord dans son Ouest rendant le mouillage beaucoup plus confortable. Les prévisions confirment ce que nous avions entrevu les jours précédents le créneau est bon pour rejoindre rapidement la côte continentale Italienne avant l’arrivée du prochain front. En plus le ciel est bien dégagé, on voit distinctement toutes les îles Eoliennes se détachant sur l’Horizon.

c’est un grand progrès : les jours précédents on réussissait seulement à apercevoir Vulcano – la plus proche entre deux nuages sombres. P’tit dej’ rapidement avalé et à 07:00 l’ancre est relevée. A quelques milles de la côte, merveilleuse surprise : l’Etna apparaît dans toutes sa splendeur enneigée surplombant de sa masse imposante tous les autres sommets de l’île.

Nous le verrons nettement jusqu’à une quarantaine de milles de la côte. En attendant nous fonçons vent de travers entre les îles et leurs falaises torturées. Mais le clou du spectacle c’est en tout début d’après-midi : la côte nord du Stromboli. Au dessus des coulées de lave noires toutes récente, le cratère crache des volutes de fumée blanche. Le Stomboli est le volcan européen le plus actif et est en irruption permanente depuis 1930, la dernière explosion importante remonte à 2022. Malgrès tout, il y a deux villages et des gens qui y vivent. Pour nous, passer 1 mille au large c’est déjà assez impressionnant.

Le vent reste soutenu et la mer pas trop mauvaise jusqu’au bout. A minuit nous arrivons à Scario au fond du golfe de Policastro. Nous pensions que la côte protégerait le mouillage du vent et de la houle orientée nettement Nord Ouest au large. Pour le vent c’est bien le cas mais pour la houle pas vraiment : elle contourne les pointes en s’atténuant à peine rendant l’endroit assez rouleur mais bon ! On ancre quand même devant les jetées du petit port. Ce n’est pas notre nuit la plus confortable mais l’accroche est bonne et on arrive quand même à dormir.

OLIVÉRI

L’endroit est très particulier : falaises abruptes surmontées d’un monastère, mais surtout la pointe est prolongée d’un immense banc de sable faisant office de digue et protégeant la baie de la houle du large mais par dessus lequel on aperçoit Vulcano et Lipari les plus proches îles Eoliennes. Abri parfait pour le vent et la houle prévus à condition toutefois qu’ils ne mettent pas trop de Nord dans leur Ouest. Nous sommes rejoints un peu plus tard par Muscat, le catamaran Australien de Nils et Maïté. Avec qui nous prenons un verre le lendemain soir.

Mardi il pleut presque toute la journée. Nous en profitons pour étudier la suite du parcours : Sardaigne ou côte continentale Italienne, le choix ne sera pas simple et dépendra essentiellement de scénarios météos sur la prochaine semaine.

Mercredi matin le vent ne souffle pas trop fort, on en profite pour aller à terre. Le banc de sable, les dunes et les lagunes qui le précèdent, sont un parc naturel que nous explorons de long en large. Puis nous allons « en ville » qui est un bien grand mot pour cette toute petite station balnéaire ou 90 % des constructions font fermées, les seuls habitants que nous voyons sont les maçons, jardiniers et autres artisans effectuant l’entretient hivernal des villas. Il y a tout de même un supermarché bien achalandé ouvert.

Jeudi nous continuons à décortiquer les fichier gribs et à faire tourner les routages. L’option sarde semble de plus en plus compromise à cours terme : Le Mistral venant tout droit de Marseille va encore prévaloir générant trop de vent de face dans les prochains jours et trop peu par la suite. La côte italienne au Sud de Salerne serait plus facilement accessible mais la houle créé par ces quelques jours de vent d’Ouest risque de rendre les mouillages très inconfortables. Le choix du « où et quand » partir ne va pas être une décision facile

Affaire à suivre…

passage du détroit de Messine

14 Avril 2014, 17:00 nous levons l’ancre. Le temps est idéal mer plate juste un peu de vent pour nous permettre de sortir de la rade de Syracuse à la voile, en plus le vent adonne au fur et à mesure et nous permet de rester sur la route directe.

Comme expliqué dans l’article précédent les conditions dans les prochaines 24 heures sont idéales voir inespérées pour franchir le détroit de Messine en toute quiétude. Nous devront sans doute faire pas mal de moteur mais c’est toujours moins désagréable que de se battre dans une mer hachée par un vent contre courant et de toute façon comme les voiliers de notre taille n’ont pas le droit de pénétrer dans la zone de séparation de trafic il y a peu de place pour évoluer à la voile et certainement pas pour tirer des bords. Le détroit est redouté des marins depuis l’antiquité. C’est ici qu’est née la légende de Charybde et Scylla considéré à l’époque comme des monstres marins redoutables, en fait des tourbillons formés par les courants de chaque côté du détroit lors des marées de forts coefficients.

Pas d’arrêt, donc, pour nous à Catagne ni à Taormina ni même à Messine. Toute la nuit nous glissons sur une mer d’huile nous apercevons quelques cargos isolés et un ou deux pêcheurs mais en fait très peu de trafic.

Vers 07:00 nous arrivons en vue de l’entrée de la ZST. Nous appelons Messine Traffic pour leur signaler notre approche sur le canal 13, ils nous autorisent à effectuer notre passage le long de la côte sicilienne à condition de rester bien en dehors de la ZST. Cette démarche ne serait pas obligatoire mais elle est fortement conseillée, nous avons lu des articles de voiliers qui ne se seraient pas signalés et qui auraient reçu un amende…

Nous sommes un peu tôt pour la marée, le courant ne doit se renverser que d’ici 2 heures. Avec ce coefficient ce n’est pas un problème, nous ferons tout le passage contre le courant : il ne dépassera jamais les 2 nœuds et la plupart du temps aux environs d’un nœuds.

A 10:00 nous passons le cap Peloro qui marque la sortie nord du détroit côté Sicilien. Et bien sûr les traditionnel pêcheur d’espadons sont là perchés tout en haut de la hune de leurs bateau.

Et là, la question se pose: où aller ancrer ce soir? A partir de Mercredi et jusqu’à la semaine prochaine un coup de vent d’Ouest très fort est annoncé avec beaucoup de mer. Difficile donc de se convaincre d’aller passer la semaine aux îles Eolienne (les bien nommées) où le vent devrait souffler encore plus fort que partout ailleurs. Milazzo semble une possibilité il y a une petite marina sympathique et abordable au nord de la ville mais nous ne sommes pas encore en saison, elle est fermée. Il y a bien la marina du centre ville mais à 100 Euros la nuit surtout si on y reste bloqués pour la semaine çà ne va pas le faire, en plus avec le trafic de ferry rapide (28 noeuds!)que l’on voit entrer et sortir et l’énorme raffinerie juste derrière çà ne doit pas être à proprement parler un endroit de rêve. On décide donc de poursuivre jusqu’à Oliveri à une quinzaine de milles de là.

Syracuse porte de la Sicile

Le Mercredi 10 avril 2024 à 02:00 nous mouillons dans la rade de Syracuse après 3 jours et 18 heures de traversée. Nous avons suivi assez précisément les routages que nous avions fait avant de quitter la Crète (nous n’avons plus d’abonnement Iridium donc plus d’internet quand nous sommes en dehors de portée des antennes 4G soit environ 10 à 20 milles des côtes) Les prévisions des gribs se sont révélées étonnamment proches de la réalité jusqu’à l’arrivée en dépit du fait qu’elles dataient de 4 jours (Arpège, GFS et ICON – les 3 donnaient sensiblement les mêmes conditions). Du petit temps au départ, quarante heures de vent bien soutenus mais jamais plus de 18 nœuds, 1 vingtaine d’heures de moteur pour aider le passage dans la mer avec moins de 7 nds de vent et d’excellentes conditions de mer et de vent pour les dernières 24 heures. Énormément de trafic maritime dans les deux sens, j’ai dû appeler au moins 8 cargos pour savoir de quel côté ils voulaient nous croiser suscitant toujours une réaction très aimable de l’officier de quart suivi d’un changement de route leur permettant de passer à bonne distance. Aussi beaucoup d’activités de contrôle de la part de la marine et des gardes côtes italiens avec navires et avions, sans doute la chasse aux passeurs de migrants?

La rade de Syracuse est parfaite pour une arrivée de nuit : bon alignement d’entrée, à l’abri de tous les vents, beaucoup de place pour ancrer sur un fond plats à 8m. La citadelle et la vieille ville illuminées nous accueillent. Ne pas oublier toutefois d’appeler le « Harbour Master » pour confirmer la zone de mouillage.

Après une bonne nuit de sommeil nous allons à terre pour jouer les touristes (en fait c’est pas un jeux, c’est pour de vrai.:))

L’histoire de la Sicile en général et de Syracuse en particulier est extrêmement compliquée : fondée par les Grecs, revendiquée par Carthage, conquise par les romains puis les Byzantins, 2 siècles et demi sous domination Arabe puis Normande, Souabe, Angevine, Aragonaise, Espagnole, Bourbon de Naples et j’en passe, avant de devenir finalement Italienne en 1860. Toutes ces péripéties ont laissé beaucoup de traces dans la vieille ville bâtit sur l’île d’Orthigie et se retrouvent dans l’architecture très variée des monuments.

On commence notre visite par les remparts surplombant la rade. La fontaine d’Arethuse est une source d’eau douce limpide coulant dans un bassin pratiquement au niveau de la mer dont elle est protégée par un mur. Elle alimentait autrefois la ville en eau potable. La légende veut que la nymphe Aréthuse aurait été changée en source par Diane pour lui permettre d’échapper aux assiduités du dieu fleuve Alphée.

Une impressionnante forteresse commande l’entrée de la rade c’est le château Maniace (du nom du général Byzantin qui en construit la première version aux alentours de l’an mille. La citadelle actuelle aurait été édifiée 2 siècles plus tard à l’initiative de l’empereur Frederik II duc de Souabe. Malheureusement le château est fermé au public jusqu’à la semaine prochaine en raison d’un festival de cinéma.

Nous nous contenterons de l’admirer de l’extérieur depuis le pied de la très récente statue d’Icare.

Autre monument intéressant : la cathédrale, érigée au 7éme siècle en incorporant les colonnes d’un temple grec dédié à Athéna, elle fut à l’époque la première cathédrale construite en Europe et la deuxième dans le monde après celle d’Antioche. Sa façade extérieure de style baroque ainsi qu’une grande partie de la déco intérieure date de la fin du 17ème siècle.

Nous passons une bonne partie de la journée a déambuler dans les ruelles.

Pour l’anecdote : toutes les boutiques de la ville vendent des têtes de maures en porcelaine colorées toujours par deux (l’homme et la femme). Les légendes qui ont créé cette popularité datent de la domination Arabe (1000/1200) et seraient basées sur une histoire d’amour clandestine qui aurait mal tournée…

En faisant le ménage à bord le jour suivant on s’aperçoit qu’il y à de l’eau douce dans les fonds. Une fuite sur le réservoir du carré (nous avons 2 réservoirs d’eau douce, l’autre est sous la couchette avant). La fuite est rapidement identifiée et peut être assez facilement réparée. Mais ce réservoir est moitié plein il faut donc transvaser son contenu dans le réservoir avant qui lui est presque vide et bien sûr il nous manque un peu de matériel pour le faire. Nous parcourons donc les rues de la ville moderne à la recherche d’un quincaillier ou d’un magasin de bricolage avec un rayon plomberie mais aucun n’a ce qu’il nous faut (les 4 endroits visités n’ont d’ailleurs pratiquement rien à part des robinets domestiques) on va donc se débrouiller avec les moyens du bord et finalement çà se passera très bien. La ville moderne ne présente strictement aucun intérêt : beaucoup de détritus sur les trottoirs et de maisons délabrées l’endroit ne respire pas la richesse. Il y a quelques sites disséminés dans cette partie de la ville mais après notre tournée des quincailliers on ne se sent pas le courage de se faire la visite d’un musée de toute façon on aurait voulu on aurait pas pu : le musée et le parc d’archéologie sont fermés pour la préparation de concerts.

Le lendemain nous sommes contrôlés par la vedette de la Guardia di Finanzia (Douane) ils ne nous abordent pas mais nous tendent une épuisette dans la quelle nous plaçons nos documents qu’ils vont contrôler un peu plus loin avant de revenir nous les rendre toujours avec l’épuisette. Ils sont très polis et l’un deux parle parfaitement français.

A quai il y a un navire de l’ONG Sea Watch spécialisé dans le secours en mer au migrants. Nous le voyons sortir du port mais visiblement il met cap au nord, à l’opposé donc de sa zone d’activité supposée au large de la Libye. Fin de mission ou restriction imposée par les autorités ?…

Dimanche matin on décide d’aller faire les courses au Lidl du coin (partie nord ouest de la rade). Cette zone de la baie est un mélange de friches industrielles couvertes d’ordures, d’usines délabrées squattées par des migrants, route étroite avec beaucoup de circulation sans trottoir utilisable pour les piétons et parmi tout ça, centres commerciaux bar de motards et restaurant chics.

De retour à bord avec nos provisions, nous finissons la réparation du réservoir et le rangement de toutes les affaires que nous avions dû déplacer pour l’atteindre il est 16:30.

De puis que nous sommes à Syracuse, nous continuons bien sûr à suivre de près l’évolution de la météo et nous avons identifié que les prochaines 24 heures présentent les conditions idéales pour passer sereinement le détroit de Messine : très peu de vent mer plate, courant minimum (mortes eaux coefficient 40) conditions qui ne semblent pas vouloir se reproduire avant très longtemps. Mais pour atteindre à temps il faut partir tout de suite sans faire escale en route. Banco le temps d’une courte baignade et nous levons l’ancre !

Re-bonjour la Crète, au revoir la Grèce!

Mardi 2 avril 2023, de bonne heure (07:00) et de bonne humeur, nous quittons Folegandros. Le vent est encore faible à l’abri de l’île mais suffisant pour avancer. Nous tirons quelques bords pour rester sur la route. Au bout d’une douzaine de milles, le vent s’établit à 15 nœuds. Nous sommes au près pas trop serré avec 1 ris. Toute la journée le vent monte très progressivement jusqu’à une vingtaine de nœuds nous faisant passer à la trinquette pour une petite heure puis décroît un peu en adonnant légèrement comme nous commençons à apercevoir la Crète au loin sur l’horizon, la mer est restée peu agitée sur l’ensemble du parcours. D’après les cartes météo, nous étions juste sur la limite Est d’un flux d’Ouest assez fort, au bon endroit donc pour une traversée confortable.

Ne voulant pas rentrer en pleine nuit par ce vent d’O.N.O. dans le port de Chania nous avons prévu notre atterrissage à la crique de Marathi une petite baie bien protégée des vents d’Ouest à Nord sur la côte Est de la péninsule d’Akrotiri. A 23:00h nous mouillons sur un bon fond de sable bien plat. Nuit paisible.

Au matin, le temps est magnifique et les sommets enneigés de l’île se détachent sur le ciel bleu (non, non, la photo n’est pas truquée ni générée par une IA nous sommes tôt dans la saison et les sommets culminent à plus de 2400 m)

Après une bonne grasse matinée et un petit dej’ copieux, on se pique une tête dans l’eau cristalline. Elle est encore fraîche (21°) mais çà fait du bien. Enfin de matinée nous levons l’ancre et contournons la péninsule pour venir nous amarrer à quai au port de Chania juste sous ces magnifiques bâtiments vénitiens.

Le lendemain nous avons la visite de Sophie (la sœur d’Anne) et de son fils Quentin en vacances pour quelques jours sur l’île. Ballade sur le port et la jetée vénitienne avec encore cette vision magique des sommets enneigés en arrière plan, repas sympa au resto puis on passe l’après -midi à déambuler dans le dédale des petites rues pittoresques de la vieille ville encore tranquille.

L’année dernière nous y étions 15 jours plus tard et la différence est énorme : cette fois-ci il y a beaucoup moins de touristes et toutes les boutiques ne sont pas encore ouvertes : c’est bien agréable.

Le Vendredi 5 avril est consacré au courses (excellent super marché Sklavenitis juste au dessus de la vieille ville.) et à la préparation du bateau pour la traversée vers la Sicile. Les gribs nous indiquent un meltem assez musclé à partir de Lundi mais des conditions convenables pour une traversée sans histoire si on part demain matin même si nos routages nous indiquent une contribution nécessaire du moteur pour traverser les calmes au début et à la fin du parcours.

Samedi 08:00 nous quittons Chania. Le temps est superbe et la mer parfaitement calme mais effectivement il nous faut aller jusqu’à le cap Spathi (extrême Nord-Ouest de l’île) au moteur pour enfin toucher le vent. Et c’est sur la vision des sommets enneigés de Crète sur notre arrière et la silhouette de la Petite Cythère (Antikythera) sur tribord que nous quittons la Grèce, destination Syracuse.

Folégandros

Nous nous dirigeons vers Folegandros une bonne quinzaine de milles à l’Ouest d’Ios et séparée de cette dernière par Sikinos pour gagner encore dans l’Ouest avant le saut pour la Crète. C’est une petite île très escarpée. Son port, Karvostasis n’offre qu’une protection très relative et dérisoire en cas de Sirocco ou pire de Meltem qui fait parait-il tomber de véritables williwaws des sommets de l’île. Mais aujourd’hui pas de risque le temps est calme. On mouille, le « cul » amarré à la jetée et comme çà devient une Habitude, nous sommes seuls.

Un ferry rapide arrive. Le capitaine de port qui joue aussi le rôle de lamaneur vient nous voir pour percevoir la taxe de 10 Euros. On lui demande s’il y a un bus pour monter à la Chora. Pas de soucis nous dit-il si vous attendez que j’en ai fini avec le ferry je vous conduis là haut ! La route (3 kilomètres) serpentant dans une vallée aride ne présente aucun intérêt. Par contre la Chora (village principal de l’île perché tout en haut) est tout simplement magnifique. D’abord la vue du haut des falaises sur le chemin qui monte au monastère, Puis le centre du village proprement dit avec ses chapelles et ses maisons blanches entourant la petite place bien ombragée par une sorte de bignone gigantesque (feuillage similaire à la notre mais fleurs mauves et plus petites).

Nous hésitons à nous arrêter prendre un verre avant de redescendre mais décidons finalement qu’une bouteille d’eau serait plus raisonnable et grand bien nous en a pris : à peine sorti du village nous passons devant l’arrêt du bus et le chauffeur nous dit qu’il redescend au port dans 2 minutes ! (il n’y a en cette saison que 3 bus par jours et celui-ci est le dernier).

Nuit paisible et au levé du jour nous partons cap Sud-Sud-Ouest direction la Crète