Après quelques recherches sur internet et quelques coups de téléphone, nous avons enfin trouvé un véhicule de location, un petit 4×4 (un Honda CRV vieux d’au moins 10 ans mais en assez bon état) c’est tout ce qui leur restait et en plus il n’est pas plus cher que la petite voiture qu’on avait loué à Napier. Nous sommes, content il y a de la place comme çà nous pouvons emmener les coussins du bateau pour améliorer nos nuits sous la tente, en plus de tout le barda habituel. On sera aussi plus à l’aise sur les routes non goudronnées et autres chemins de terre. Il a fallu aller le chercher pour midi à l’aéroport de Christchurch (une heure et demie de bus avec le changement). De retour au bateau, à peine le temps de casser la croute et nous avons fait vinaigre pour tout mettre dans le coffre et roule ma poule…

La région de Canterburry (dont Christchurch est la ville principale) est une vaste plaine agricole qu’il nous faut traverser sur 200 km avant d’espérer trouver le coin idéal pour passer la première nuit. La route est droite et monotone avec beaucoup de camions. Domi a téléchargé le catalogue des campings du Departement of Conservation (D.O.C. : l’organisme gouvernemental qui gère les parcs nationaux et autres réserves). Notre choix pour cette nuit se porte sur le parc d’Orari gorge (l :-43.98776 ; L :-171 .18478). Le camping est aménagé parmi de belles collines rondes et boisées. Nous plantons notre tente sur une pelouse bien plate avec une table et un barbecue que nous ne pourrons pas utiliser, les feux étant strictement interdits comme nous l’a tout de suite rappelé le voisin. L’endroit est très sympa et nous sommes peu nombreux. Il y a toujours dans ces campings standards, un toilette (fosse le plus souvent) très propre, muni de papier hygiénique et de désinfectant pour les mains. Dans les plus fréquentés, on peut y trouver des tables et des bancs ainsi qu’un endroit pour faire la vaisselle.

A Geraldine nous obliquons vers l’ouest et c’est parti pour la montagne. Nous grimpons vers le lac Pukaki en passant par le lac Tekapo qui sont tous les deux des lac artificiels avec barrages mais leur couleur bleu pâle si caractéristique ne laisse aucun doute : ils sont bien alimentés par des glaciers. Derrière eux, majestueux se dresse le mont Cook enneigé : nous avons de la chance, aujourd’hui la visibilité est parfaite.

Le soir nous nous arrêtons à Quailburn (L :-44.36256 L :-169.80492) quelques km à l’écart de la route. On a eu du mal à trouver ce petit paradis , le camp est mal indiqué et un peu abandonné , nous étions tout seul à côté d’un petit torrent et d’une grange abandonnée, utilisé de 1860 à 1990 pour la tonte des moutons : le lieu est classé historique J . Après avoir monté la tente et nous être baignés dans le torrent, nous sommes partis pour une ballade dans la montagne. Le sentier balisé passe par un col et atterrît de l’autre côté de la vallée. Le matin le soleil se lève bien dans l’axe de la vallée, nous réchauffant rapidement et éliminant l’humidité de la nuit. Comme nous sommes tout seuls nous profitons pour faire une toilette soignée dans le torrent.

Nous n’avions pas prévu d’itinéraire précis. Nous avions en tête d’aller jusqu’à Invercargill pour dire bonjour à Stéphane, le cousin de ma belle sœur Joëlle, qui s’est établi là bas. On lui passe un coup de fil en route. Malheureusement il est pris par son travail mais du coup il nous conseille sur ce qu’il faut voir dans la région.

Nous changeons donc nos plans et nous nous dirigeons vers Queenstown. C’est la route la plus touristique qui longe des gorges impressionnantes. Avec le rafting et la tyrolienne, la grande attraction dans ces gorges, c’est le saut à l’élastique au dessus des remous. Le grand jeux c’est de sauter de façon à ce que l’élastique se tende suffisamment pour pouvoir toucher l’eau avec la tête. La rivière descend du lac Wakatipu au bord duquel se trouve Queenstown. C’est une station balnéaire très fréquentée et sans doute très agréable mais nous ne nous y arrêterons que pour faire le plein de courses, trop de monde à notre goût. Nous pensions poursuivre jusqu’à Glenorchy 40 km à l’extrémité nord du lac (pour les fans de série télévisée c’est là que Jane Campion a tourné Top of the Lake avec Elisabeth Moss diffusé en France sur Arte) mais le camping est encore 15 km après le village et comme il se fait tard nous quittons la berge du lac peu après Queenston pour monter jusqu’au lac Moke (L :-44.99811 L :-168.57308) qui à aussi servi de décor à une partie de la série. C’est sûr il y a plus de monde que là où nous étions hier soir mais l’endroit est très beau et il y a de l’espace. Nous retrouvons les vues de la série et cela nous amuse beaucoup. Sur le lac il y a plein de canards qui ne sont pas du tout sauvage et qui profitent de notre passage pour engraisser un peu.

Il pleut une bonne partie de la nuit et notre tente n’est pas vraiment étanche (on l’avait achetée il y a quelques années à Abu Dhabi où ce n’était pas du tout un problème), à l’intérieur la literie commence à mouiller sérieusement. La tente est trempée et au levé du jour dès que la pluie se calme, nous replions le tout et allons nous promener dans la vallée en aval du lac.

Nous n’irons pas plus au sud, la route allant à Milford Sound est fermée suite à des glissements de terrain provoqués par des pluies torrentielles 10 jours plus tôt. Les autres fjords sont inaccessibles par la route et les bateaux de croisières qui les visitent sont complets jusqu’au début mars.

Nous décidons donc de rentrer doucement par la côte ouest en passant par la station de ski de Cardrona et le lac Wanaka. La route, sinueuse et escarpée, serpente entre les montagnes couvertes de tussack (tussock : de grosse touffes d’une herbe particulière que nous avions aussi rencontrée aux Malouines). Pour le piquenique du midi, nous trouvons toujours des emplacements sympas est aujourd’hui c’est au bord du lac Wanaka. Le déjeuner avalé, nous piquons une tête dans le lac, l’eau n’est pas froide et nous nageons quelques minutes. La route que nous prenons est considérée comme une des plus belles de la nouvelle Zélande et je dois dire que malgré le mauvais temps qui assombri le ciel nous ne sommes pas déçu. Le paysage est magnifique alternant lacs bleu profond, sommets enneigés, pentes abruptes en pierre sombre ou arrondies et couvertes d’herbe jaunie. Les arrêts photos sont fréquents. Puis nous quittons la région des lacs et montons en direction du col de Haast. Les étendues herbeuses font place à une forêt primaire humide luxuriante où se mêlent toutes les nuances de vert. Les nuages bas et la pluie maintenant continue nous font prendre toute la mesure du terme anglais utilisé pour nommer la forêt primaire : rain forest… Domi angoisse un peu pour le camping de ce soir, on croise beaucoup de camping car (camper vans comme il disent ici), et il aurait voulu réserver ce matin par internet pour être sûr d’avoir de la place mais je l’en ai dissuadé : trop d’incertitude pour savoir jusqu’où on pourra aller. Et bien nous en a pris : en passant au camping où nous pensions nous arrêter tout est détrempé et les emplacements qui restent ne sont pas plat du tout ou carrément en bordure de route (Pleasant Flat L :-44.01178 L :-169. 381).

Nous continuons donc la route le long de la rivière jusqu’à la mer où elle se termine en un large estuaire de galets gris que nous traversons sur un très long pont à voie unique. La route alterne bord de mer aux arbustes torturés par le vent et rain forest impénétrable. Nous avons repéré un peu plus loin un autre camping au bord du lac Paringa. Mais là, déception, aucun emplacement libre où l’on pourrait planter une tente et de toute façon il pleut toujours. Il commence à se faire tard et le prochain camping sur la liste du D.O.C. est à près de 100 km… Va-t-on être contraint de dormir dans la voiture ? Non ! La chance est avec nous et à 500 m de là un motel s’offre à nous, il tombe à pic! La patronne très sympathique nous propose le choix entre des lits dans un dortoir, une chambre double (les deux avec cuisines et douches communes) où un studio avec salle d’eau et cuisine individuelle. Elle fait aussi camping mais elle nous dit qu’il est tombé aujourd’hui 85 mm d’eau (on était derrière la perturbation en a vu qu’une petite partie) et que le sol est vraiment détrempé. Domi est fatigué de la longue route, il est seul à conduire et, au diable l’avarice après tout nous venons d’échapper à une nuit qui aurait pu être très désagréable, pour 110 dollars (65euros) nous prenons le studio. C’est vraiment parfait et en plus la vue sur le lac est très jolie. On profite du confort et on se prépare un bon plat de crevettes que nous arrosons d’un sauvignon blanc. Le matin, la brume se lève et le client d’à côté nous explique qu’il vient là très souvent depuis Queenston ou il habite pour pêcher le saumon. C’est l’époque de la reproduction, les saumons viennent de la mer et remontent la rivière jusqu’au lac pour se reproduire à l’endroit précis ou ils sont nés. Ils font ce voyage une seule fois dans leur vie vers l’âge de trois ou quatre ans. Une fois les œufs pondus les saumons meurent dans le lac. Les saumons pêchés ici font en général entre trois et quatre kilos. Ils peuvent atteindre exceptionnellement jusqu’à dix kilos.

On pourrait penser qu’arrivé sur la côte que la montagne c’est terminé mais non ici sur la route des glaciers, la montagne tombe littéralement dans la mer et entre les gros nuages de pluie nous apercevons les sommets enneigés. Le bord de mer est une alternance de falaise battues par la houle de la mer de Tasman et les longues plages de galets et de sable gris. Ces plages sont jonchées de souches d’arbres gigantesques, de troncs et de branches de toutes tailles sur des kilomètres. Les sols glaciaires de la région sont principalement constitués de graviers et de galets recouverts d’un peu de terre végétale et sont de ce fait assez fragiles. Lors des crues, les rivières sapent les berges et emportent les arbres qui sont charriés jusqu’à la mer, la houle du large et les courants côtiers les rejettent à la côte ou ils s’échouent. Jusqu’au milieu de la journée le temps reste bouché, nous n’arriverons pas à voir le glacier de Fox. Après une pose déjeuner à Gillespie Beach où nous sommes obligés de nous emballer des pieds à la tête pour ne pas être dévorés tout crus par les sand flies (littéralement mouches de sables, sorte de mouches microscopiques aussi appelées nonos en Polynésie, elles sont présentes sur toute la région). L’après-midi, nous tentons notre chance au glacier Franz Josef et là, le ciel nous sourit, une éclaircie nous permet de le voir juste au moment ou nous arrivons à son pied. Comme le beau temps tarde toujours à s’installer, et que la perspective d’une nuit humide ne nous enthousiasme pas beaucoup nous optons ce soir encore pour la facilité d’un motel. Nous en trouvons un qui à des chambres libres à Ross. Celui-ci a l’avantage d’être au calme un peu à l’écart de la route principale. Ross était réputée pour ses mines d’or. La découverte des premiers filons en 1865 a déclenché une ruée et profondément transformé toute la région : création de ports à Hokitika et à Greymouth, chemin de fer, village etc. Le gisement a été exploité jusqu’en 1993. Un musée (gratuit !J) permet d’apprendre l’histoire du village et suivre les mineurs dans leur course vers la richesse. Il y aurait encore de l’or dans la rivière et pour quelques dollars on peut même louer un tamis et essayer de récolter quelques pépites. Ce matin le soleil est enfin au rendez-vous. Nous optons pour une grande promenade dans la rain forest et nous allons jusqu’à l’entrée des puits de mine par le sentier aménagé.

Retour sur la mer de Tasman à Hokitika où on se demande comment des navires ont put aborder au siècle dernier tant la barre semble infranchissable avec ces rouleaux qui ramènent à la côte tous ces troncs d’arbres. Pas étonnant qu’il y ait eu tant de naufrage à l’époque ! L’or rend fou… Nous poussons jusqu’à Greymouth et après un pique-nique rapide au bout de la jetée (ici il y a un vrai port même si l’entrée ne doit pas être toujours facile), nous nous offrons un thé, un chocolat chaud avec des Strup Waffels qu’un Hollandais vend dans sa chaloupe (sur remorque) le week-end aux passants pour un peu on se croirait à Scheveningen J. Les gens ici qu’ils soient étrangers où Néo Zélandais sont très sympas et prennent toujours le temps pour discuter. Après la ruée vers l’or, le port fonctionnait principalement pour le transport du charbon des mines locales. Mais depuis le déclin de la production de charbon dans les années soixante, il n’y a pas grand-chose à faire ici à part la pêche et la ville est comme suspendue au passé. En remontant la rivière, nous apercevons les vestiges de la mine de charbon qui a fait une soixantaine de morts dans un coup de grisou en 1896 (l’accident industriel le plus meurtrier du pays).

La route entre Greymouth et Christchurch s’appelle la West Coast Road, elle passe par le col d’Arthur’s Pass. Là encore le paysage est assez grandiose. De chaque côté du col une large vallée crée au gré des crues des rivières qui y coulent d’un côté vers la mer de Tasman et de l’autre vers l’océan Pacifique. La vallée se rétrécit pour n’être plus qu’une gorge étroite au niveau du col qui se traverse grâce à un viaduc impressionnant. Nous avons choisi de passer la dernière nuit de camping de cette escapade à Hawdon Shelter (L :-42.98786 L :-171.74789). Nous quittons la route principale, traversons le lit de la rivière sur un pont étroit, puis suivons sur la rive droite du torrent sur une piste caillouteuse pour arriver à une forêt dont les arbres ont des feuilles ressemblant à du buis. Nous sommes seul dans une immense clairière, il y a un petit abri avec une cheminée où nous pourrons faire du feu pour éloigner les fameux nonos/sand flies qui nous attaquent tous les soirs et un coin pour faire la vaisselle, le rêve quoi. Sauf qu’en pleine nuit un « camper van » arrive sur le site et devinez quoi la clairière ne faisant que 5 hectares ils choisissent de s’installer à 2 mètres de nous, la peur du vide sans doute…

Le lendemain, nous sommes plus qu’à une centaine de kilomètre de Lyttelton. Nous avons donc tout le temps pour une dernière petite rando dans la montagne. Nous choisissons de la faire au pied du mont Cheeseman, d’abord dans les bois du côté de Texas Flat puis après un piquenique au bord du ruisseau nous montons en voiture jusqu’à la barrière de Middle Hut et le reste à pied jusqu’à la station de ski d’où nous découvrons une vue panoramique sur toute la vallée jusqu’à l’océan Pacifique, inoubliable !

Mais l’heure tourne et le temps de redescendre il est déjà 18 heures quand nous arrivons au bateau. Mais pas de répis pour les touristes. Il faut décharger nos affaires à toute vitesse pour repartir en ville faire les courses. On doit rendre la voiture demain matin à l’aéroport et nous n’auront pas le temps de les faire. Ici à Lyttelton il n’y a rien, le super marché le plus proche c’est le Pack’n Save du centre ville de Christchurch à une quinzaine de kilomètres.
Fin d’une belle escapade terrestre…

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